Historique des Orgues de Village-Neuf
L‘orgue Joseph CALLINET 1824 : Dans la première église paroissiale de Village-Neuf se trouvait un orgue, d‘un seul clavier de 54 notes réparties sur 11 jeux et un pédalier de 15 notes répartis sur 3 jeux, construit en 1824 par Joseph CALLINET de Rouffach. Son épouse Eugénie SARTORY était originaire de Huningue.
Avec la fin du XIX ème siècle vint l‘accroissement de la population et la nécessité de bâtir une église plus grande. Ceci se fit en 1903 et la paroisse décida immédiatement de doter le nouvel édifice de style néo-gothique d‘un orgue. Pour cela, elle fit appel au facteur d’orgues JosephAntoine BERGER, successeur de la célèbre maison CALLINET, établie à Rouffach. Selon les archives paroissiales, Joseph-Antoine BERGER a réutilisé la majeure partie de la tuyauterie et les sommiers de l’orgue CALLINET et les a transférés sur le nouvel orgue à traction mécanique. Le buffet d’orgue de style néo-gothique - que l’on peut toujours voir actuellement - date de 1903 et fut réalisé en chêne teinté par la maison KLEMM de Colmar.
Ce buffet d’orgue a survécu aux deux Guerres Mondiales et forme avec le reste du mobilier de l’église un ensemble harmonieux témoignant du style néo-gothique du début du XXème siècle. L’entreprise KLEMM confectionna aussi les confessionnaux, la très belle chaire sculptée, les autels latéraux et la coiffe du baptistère.
Après la première Guerre Mondiale, l’orgue et le buffet de Klemm étaient endommagés : les côtés de l’instrument en chêne massif avaient été détruits. De plus, il lui manquait tous ses tuyaux de façade en étain qui avaient été réquisitionnés par les troupes allemandes. Ce ne fut que six ans après la « Grande Guerre » que Jules BESSERER, facteur d’orgues installé à Leymen, fut chargé de le restaurer. En 1924, il fit subir à l’orgue ce que l’on appelait "eine gründliche Reparatur" …. Une rénovation totale !
Tout en conservant des tuyaux de qualité (certains tuyaux antérieurs à 1824 jouent encore dans l’orgue actuel), les sommiers mécaniques endommagés furent supprimés et selon la mode de l’époque, l’orgue fut pneumatisé et doté d’une console indépendante tournée vers l’autel. Le devis de Jules BESSERER, conservé dans les archives paroissiales, révèle que l’orgue comptait alors 24 jeux en tout, répartis sur deux claviers manuels de 56 notes chacun, le clavier de « Grand Orgue » ayant 9 jeux, le clavier de « Récit expressif » ayant 10 jeux et un pédalier de 30 notes ayant 5 jeux. Selon le goût de l’époque, tous les jeux de fourniture, cymbale, mutations et anches à la française cédèrent la place à de nombreux jeux romantiques.
Jules BESSERER plaça son orgue dans le buffet existant de KLEMM, remplaça les côtés du buffet et installa aussi le premier ventilateur électrique ainsi qu’une façade, malheureusement en zinc (des tuyaux en étain plus onéreux auraient donné une sonorité bien meilleure). Ce nouvel orgue présentait alors les meilleurs accouplements et registrations réalisés à cet époque - il fonctionna jusqu’en 1948.
Après la deuxième guerre mondiale, l’orgue étant une nouvelle fois endommagé par faits de guerre, on fit appel à la Manufacture de Grandes Orgues Georges SCHWENKEDEL et Fils de Strasbourg-Koenigshoffen. Cette entreprise procéda au démontage complet de l’instrument. La traction pneumatique endommagée fut remplacée par une traction électro-pneumatique.
La maison SCHWENKEDEL remplaça aussi certains jeux romantiques de 1924 (présents à profusion dans l’orgue de Besserer) par des jeux "néoclassiques" tels que les mutations, fournitures ou anches à la française, qui lui avaient été retranchés en 1924. A l’issue de ces travaux, l’orgue possédait toujours 24 jeux répartis sur 2 claviers de 56 notes chacun, le clavier « grand orgue » ayant 9 jeux, le clavier « recit expressif » ayant 8 jeux et un pédalier à 30 notes ayant 5 jeux.
Le relevage de 1982 par Laurent et Chrétien Steinmetz Depuis quelques années déjà, l’orgue présentait de sérieux signes de fatigue. La console de 1924, conservée en électrifiée en 1948 par la maison SCHWENKEDEL dut être réparée tant bien que mal, de même que certaines poches pneumatiques des sommiers de 1924 électrifiés par la firme SCHWENKEDEL. Les travaux furent confiés aux frères Laurent et Chrétien STEINMETZ établis à Dachstein et Herrlisheim dans le BasRhin. A cette occasion, l’orgue fut nettoyé, les tuyaux remis en état, tout en gardant la même composition en nombre de jeux que l’orgue SCHWENKEDEL, mais fut aussi enrichi de quelques nouveaux timbres, tout particulièrement une nouvelle fourniture de 4 rgs, installée au grand-orgue à la place de la «mixtur 2 2/3’» de Besserer de mauvaise qualité (tuyaux en partie en zinc dans les graves). Les réparations, menées avec beaucoup de sérieux et de compétence ont permis de sauvegarder des tuyaux anciens, dont certains sont même antérieurs à 1824.
Après une quinzaine d’années, en 1997, cet orgue présentait de très grands signes de fatigue (transmission, état électrique de la console et des sommiers) qui, sans les nombreuses interventions par le titulaire de l’orgue M. Sorel HIRTZ, auraient rendu l’orgue quasi-inutilisable. L’état général plaidait pour un remplacement complet, d’autant que l’orgue était visiblement trop petit pour la grande église de Village-Neuf. C’est ainsi qu’en 1998, le Conseil de Fabrique décida de reconstruire l’instrument en deux étapes.
Première tranche : Christian Guerrier (père) L‘orgue a été démonté, ce qui permit la restauration des sommiers du grand-orgue et la pose d’une console neuve, munie d'un combinateur électronique. Cette première étape a été atteinte fin 1999. Sous l’impulsion du curé de la paroisse Mr André PIETTE, est née le 25 novembre 2000 l'Association des Amis de l'orgue de Village-Neuf, avec comme buts premiers de soutenir la réalisation de la 2ème tranche des travaux et de faire connaître l’orgue en organisant des concerts et manifestations. Cette deuxième tranche de travaux a permis de reconsidérer l’instrument dans sa totalité.
C’est ainsi qu’est né le formidable projet de M. Sorel HIRTZ, c'est-àdire le passage à un instrument symphonique de 48 jeux : il fallut compléter la tuyauterie, car ce projet nécessitait évidemment bien plus de tuyaux que n'en contenait l'orgue SCHWENKEDEL.
Deuxième tranche : Hugo MAYER
La réalisation du projet fut confiée à la manufacture d'orgues allemande Hugo MAYER de Heusweiler (Sarre), et le chantier commença en Septembre 2001. Il a été fait appel à des jeux d'occasion, venus essentiellement d'Allemagne (Ludeweiler et Berlin) , mais aussi de Suisse (Temple des Eaux Vives de Genève).
Il a fallu élargir le buffet avec deux petites platesfaces latérales de six tuyaux. De nouveaux sommiers ont été construits pour le Positif et le Pédalier, ainsi que pour quatre chapes du Récit. La soufflerie a été entièrement refaite. La phase de réharmonisation, déterminante dans ce genre de projet, a duré plusieurs mois et a été réalisée de main de maître par M. Patrick AKROUND de l’entreprise Hugo MAYER. Ce talent a permis de conclure ce projet avec une exceptionnelle réussite tant sur le plan de l’équilibre sonore, que sur le plan de la diversité des jeux.
L'orgue a été achevé en mars 2002, a été inauguré le 26 mai 2002 (jour du centenaire de la pose de la première pierre de l'édifice) et béni par Monseigneur Joseph DORÉ, archevêque du diocèse. Un concert inaugural, donné le même jour par Thierry MECHLER (concertiste international, professeur à vie à la Musikhochschule de Cologne et titulaire de l’orgue de la Basilique Notre-Dame de Thierenbach) a enchanté l’auditoire avec un superbe programme romantique et contemporain, idéalement adapté à cet orgue. L’orgue MAYER avec ses trois claviers à traction électropneumatique et ses 48 jeux d’esthétique "néo-romantique", fait véritablement corps avec l’acoustique et le cadre néo-gothique de la belle église Saint Nicolas de Village-Neuf.
Grâce à une harmonisation subtile, les œuvres des Maîtres français, italiens, espagnols et allemands (surtout Jean-Sébastien Bach), y sonnent à merveille. Le récit expressif symphonique avec sa batterie d’anches "alla Cavaillé-Coll" est le fidèle serviteur du répertoire romantique français, (Franck, Widor, Vierne) mais aussi allemand, (Mendelssohn, Liszt, Reger). La judicieuse composition, les tailles très larges de la tuyauterie, la judicieuse coupure de pédale, inspirée de celle imaginée par Pierre Cochereau pour les Grandes Orgues de NotreDame de Paris, permettent également l’interprétation de la musique contemporaine, comme par exemple Olivier Messiaen, Joseph Reveyron, etc…
Le nouvel orgue, d’esthétique symphonique, doté des progrès de la technologie (comme la toute nouvelle console équipée d’un combinateur) a permis de sauvegarder tous les jeux anciens de qualité provenant des instruments précédents. Ainsi se côtoient dans notre instrument des tuyaux de bonne facture issus des orgues antérieurs de Callinet (1824), de Berger (1904), Besserer (1924) ou Schwenkedel (1948).
La composition du nouvel orgue symphonique, riche de ses 48 jeux, associe des jeux romantiques plus récents et des jeux plus classiques ou plus anciens comme les mutations, cornets et mixtures.
Véritable trait d’union entre l’art ancien et l’art nouveau, la composition du nouvel orgue de Village -Neuf s’inscrit parfaitement dans la mouvance de la « Réforme alsacienne de l’orgue », dont Albert Schweitzer et Emile Rupp ont été les instigateurs. Le nouvel instrument a été pensé comme un véritable trait d’union entre la facture d’orgue ancienne et nouvelle.
La manufacture MAYER a donc réussi l’exploit de créer un instrument racé à partir de fragments épars, et de conférer à ce grand ensemble symphonique un cachet original. Cet orgue accueille de nombreux concertistes parmis lesquels Pascal REBER, titulaire de l’orgue de la Cathédrale de Strasbourg.
L’intrument se distingue particulièrement par :
• Sa coupure de pédale
• Ses deux jeux d’anches de 32 pieds à la pédale
• Ses octaves graves et aïgues sur tous les claviers
• Son séquenceur électronique
• Un buffet agrandi ….. et bien d’autres jeux surprenants…
Les multiples possibilités de registrations qu’offre ce magnifique instrument répondent aux intentions des compositeurs et mettent en valeur la diversité et la richesse des timbres des nombreux jeux, sans oublier bien sûr, l’imposant tutti !