L'Eglise Saint Maurice
Située dans l’ancien diocèse d’Angoulême, cette église faisait partie d’un prieuré fondé au XIe siècle qui dépendait de l’abbaye Notre-Dame de La Couronne, rattachée à l’ordre des chanoines de Saint-Augustin. L’évêque d’Angoulême, Pierre de Laumond a fait don de ce prieuré en 1160 à cette abbaye.
L’ancien logis du prieur datant des XVIIe et XVIIIe siècles est le seul des bâtiments du prieuré qui a été conservé.
Historique
L’église a été reconstruite entre le quatrième quart du XIIe siècle et le premier quart du XIIIe siècle. Comme bon nombre d’églises du territoire, l’édifice a dû subir les dommages de la guerre de Cent Ans (qui opposa Français et Anglais de 1337 à 1453) et des guerres de Religion (qui opposèrent catholiques et protestants pendant la seconde moitié du XVIe siècle). De nombreuses restaurations ont été menées au cours du XIXe siècle. L’église a aussi été restaurée en 1996. Elle est inscrite au titre des Monuments historiques depuis 1986.
Architecture
L’église présente un plan rectangulaire et se compose d’une nef de cinq travées. Cette nef unique est scandée par des colonnes, dont les chapiteaux sont ornés de monstres et d’animaux fantastiques ainsi que de motifs végétaux (petites feuilles sèches, très serrées).
Les sculptures dateraient de la seconde moitié du XIIe siècle.
Les chapiteaux ont été restaurés et remaniés au XIXe siècle. Un chapiteau se trouvant dans le chœur attire plus particulièrement l’attention. Il est composé de personnages alignés et portant le livre devant eux.
Il s’agit peut-être d’une représentation figurant des moines.
Ce type d’organisation en ligne se retrouve dans d’autres églises de Charente, à Montmoreau et à Gensac-la-Pallue par exemple.
Les cinq travées sont couvertes d’une voûte en pierre en berceau brisé. Les arcs doubleaux très brisés pourraient dater du XIIIe siècle. Le clocher est placé au centre de l’église sur la 6ème travée. Celle-ci a conservé une coupole sur pendentifs. Deux petites chapelles ont été créées au XVIIIe siècle et accueillent deux autels de la même période : l’un est dédié à la Vierge et l’autre à saint Joseph.
Le chevet à fond plat et a été reconstruit au XVe siècle. Il porte une voûte sur croisée d’ogives à nervures prismatiques. Il a certainement remplacé une simple abside datant du XIIe siècle. La baie du mur oriental était plus grande à l’origine. Elle a été remaniée et réduite, certainement au XVIIe siècle[1].
Un retable a été installé au-devant du mur oriental, peut-être par le prieur Vacher le Cluzeau au XVIIIe siècle. L’installation des retables et des chaires dans les églises se fait dans le cadre de la Contre-Réforme catholique (à partir de la seconde moitié du XVIe siècle).
Ce retable en pierre est de style baroque, ponctué de colonnes et surmonté de pots à feu. Deux statues, installées de chaque côté, représentent sainte Catherine[2] et saint Maurice[3]. Elles auraient été offertes par la famille de négociants en eaux-de-vie, Maurin de l’Habit.
Deux portes intégrées dans le retable ouvrent sur la sacristie aménagée à l’arrière. Celle-ci est divisée en hauteur. Au 2nd niveau de la sacristie, le remplage de l’ancienne baie du mur oriental est encore visible. Des colonnettes flanquent la baie et un de leurs chapiteaux est encore orné d’un décor feuillagé.
Extérieur
Le clocher tour a été construit durant la seconde moitié du XIIe siècle, reconstruit au XVIIe et restauré au XIXe. Constitué d’un seul étage, il possède un toit bas, à quatre pans.
Les restes d’un bâtiment de l’ancien prieuré, qui était accolé au chevet de l’église figure encore sur le cadastre napoléonien de 1828.La façade n’a plus son aspect roman. Le portail est constitué d’un arc brisé, datant du XVe siècle[4].
Une niche est installée à droite du portail, décorée d’un arc trilobé et d’une inscription « O virgo momento mei », (« Oh vierge souvient-toi de moi »). La statue de la vierge d’origine aurait été détruite à la Révolution Française. Une nouvelle statue a été sculptée en 1998.
Les combles de la nef et du chevet furent surhaussés dans un but de mise en défense de l’édifice par l’aménagement de salles hautes. Des consoles indiquant la présence d’une bretèche (un édicule placé en saillie au-dessus de la porte pour en contrôler l’accès) au-dessus du portail de la façade. La présence d’épais contreforts tout autour de l’église prouvent l’ampleur des travaux effectués. Cette fortification pourrait dater de la guerre de Cent Ans. F. Manguy, C. Teillet et L. Roméro remarquent une recrudescence des autorisations royales de mise en défense des édifices religieux de l’Ouest de la France coïncidant avec la première phase de la guerre de Cent Ans[5].
D’après J. George et A. Guerin-Boutaud, des signes lapidaires seraient visibles sur les murs de l’édifice. Sylvie Ternet qui a étudié cette église les a cherchés, en vain.
[1] André AUDOIN donne une traduction de l’état des lieux de l’église et du prieuré d’Échallat effectué en 1706 qui dit « nous avons remarqué au grand vitrail qui est au grand pignon (…) qu’il n’y a qu’environ six pieds de vitres dans le haut, et le reste a été muré, ce qui cause (…) une grande obscurité et humidité dans la dite église (…) »
[2] Sainte Catherine d’Alexandrie aurait vécu au IIIe ou IVe siècle. Elle refusa d’épouser l’empereur en raison de son mariage mystique avec le Christ. Pour cet engagement, l’empereur la condamna à être déchirée par une roue garnie de pointes. Cette roue se brisa miraculeusement mais elle ne put échapper à la mort. Elle est la patronne des clercs et des jeunes filles. Ses attributs sont la roue, la couronne de martyr et la croix. Cette statue est une référence au prieuré de Sainte-Catherine des Champs (commune actuelle de Saint-Cybardeaux).
[3] Saint Maurice est un saint presque légendaire, originaire de l’Égypte chrétienne du IIIe siècle. Il fut enrôlé dans l’armée romaine, à la tête de la légion thébaine, envoyée combattre dans les Alpes. Ses compagnons et lui refusèrent de renier leur foi. Ils furent donc massacrés sans résistance. Ses attributs sont l’uniforme de légionnaire, une croix rouge et la palme des martyrs.
[4] GEORGE (J), Églises de France, Charente, 1933
[5] MANGUY (F.), TEILLET (C.) & ROMERO (L.), La fortification des églises médiévales dans l’Ouest de la France : Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vendée, Vienne, D.E.A. de civilisation médiévale sous la direction de M.T. Camus ; université de Poitiers, 1992-1993