SERVICES MUNICIPAUX
Les services municipaux réparsacais d'hier à aujourd'hui
Ils sont devenus des personnages légendaires, et pourtant si réels, ces gardes champêtres, tambours, porteurs de télégramme, sonneurs de cloches, conducteurs de corbillard.. et tant d'autres. Certes, des fonctions municipales d'hier demeurent aujourd'hui, tel le secrétariat de mairie. Mais combien ont progressivement disparu, parce que la vie villageoise d'antan ne ressemble pas à celle de nos jours. Sûrement, les besoins de paix sociale, d'information, de réglementation du « vivre ensemble » subsistent toujours, mais sous des formes nouvelles d'applications adaptées à notre époque. Alors, parlons en de ces fonctions familières aux siècles passés.
● « Le sieur Broussin Pierre », nommé garde-champêtre
Le 18 décembre 1898, suite au décès de Jean Favraud, garde-champêtre à Réparsac ; « le sieur Broussin Pierre, 52 ans, est nommé garde-champêtre. Il entrera en fonction après avoir prêté le serment devant monsieur le juge de Paix du canton de Jarnac et reçu l'agrément du Sous-Préfet de Cognac : le maire, Auguste Pouzou ». Cet arrêté municipal précise dans les « attendus » : « Le candidat a des aptitudes physiques et une instruction suffisante pour l'emploi ».
Ce policier de la ruralité représente « la loi » dans les campagnes, au sens propre du terme... Agent de la force publique aux côtés de la gendarmerie, il partage avec elle une mission commune : la surveillance pour la sécurité de nos villages. En témoignent les termes concluant tous les arrêtés, signés par les maires successifs, concernant les droits et les interdits : « Tout contrevenant sera poursuivi conformément aux lois, sur procès verbal du garde-champêtre spécialement chargé d'assurer l'exécution du présent arrêté ». Conservés dans les archives municipales, ces nombreux arrêtés nous parlent, en fait, de la vie réparsacaise au temps de nos aïeux.
● Droit de parcours des animaux dans les pâturages communs
« Conformément à l'ancien usage local, les propriétaires et fermiers de la commune de Réparsac pourront conduire ou faire conduire leurs bêtes à cornes ou chevalines dans les pâturages (petites et grandes prairies) qu'après la première récolte (de foin) entièrement enlevée, jusqu'au 31 décembre de chaque année au plus tard.
Et les bêtes à laine dans les petites prairies, telle que la Taillée, les prés du Buisson et le pré Montaxier, du 1er novembre de chaque année au 1er mars de l'année suivante... ».
Cet extrait de l'arrêté du 22 juillet 1852, signé par François Blois, adjoint du maire, et approuvé par le préfet de la Charente, stipule que les animaux pris en défaut seront mis en fourrière par le garde-champêtre. De plus, toutes contraventions à ces dispositions seront passibles de peine de police simple, ou même correctionnelle, suivant le cas, outre la réparation des dommages.
Bien entendu sous l'exécution du garde-champêtre chargé de dresser procès-verbal contre tout délinquant.
● « ...autorise à tuer toutes les volailles... »
Les volailles aussi sont concernées en vue de la protection des récoltes et exigent la rigueur d'un calendrier comme pour les pâturages communaux. « Considérant le grand préjudice occasionné par les poules et les canards dans les prés, champs et vignes » déclare l'arrêté du mai 1857, le maire interdit « de laisser pacager aucune espèce de volailles depuis le 15 juin jusqu'au 8 août, et du 5 septembre au 25 octobre de chaque année sous peine d'être poursuivi... ».
Et dans son article 2, l'arrêté autorise le garde-champêtre « à tuer toute les volailles que les propriétaires ne renferment pas ».
● Défense de grappiller avant ordre donné
Un arrêté sur deux, durant près d'un siècle concerne le soutien au vignoble. Et le grappillage est particulièrement visé. Plusieurs fois par décade, « il est fait expresse défense de grappiller avant que la vendange soit complètement enlevée. Il sera donné ordre par son de caisse (tambour du garde-champêtre) de l'époque où le grappillage pourra être exercé » (arrêté du 31 août 1860).
● Concernant les chiens enragés...
De nombreuses décisions sanitaires sont arrêtées par les maires. Celles concernant les chiens enragés (24 mai 1897 et 14 novembre 1915) « les chiens errants seront abattus, vus les accidents récents arrivés dans cette commune ». Comme celles faisant défense à tout particulier de jeter les animaux morts, de quelques espèces qu'ils soient sur la voie publique, ou près des lieux habités (1er février 1859). Ou encore cet arrêté « interdisant fumier et purin dans les rues de Réparsac » (1912). Et, plus récemment, le 24 octobre 1937, suite aux conclusions de la commission départementale d'hygiène sur la contamination possible des eaux du bourg de Réparsac, sont prises une série de décisions municipales sur l'éloignement des fumiers, la vidange des fosses à purin...
Sans oublier les épidémies de fièvres aphteuses, comme en octobre 1938, du temps du maire Edgard Verron, ou des dégâts considérables causés par des animaux nuisibles (renards, fouines, sangliers), nécessitant des battues communales pour leur destruction (arrêtés des 15 mars et 21 décembre 1939). La liste de ces arrêtés n'est pas exhaustive.
Et, comme toujours le garde-champêtre, souvent associé à la gendarmerie, est chargé d'assurer, avec rigueur, l'exécution de ces mesures protégeant la santé publique.
● Marcel Combaud, médaillé militaire
La police rurale est très ancienne puisqu'elle remonte au Haut Moyen Age. Mais c'est la loi du 8 juillet 1795 qui définit le statut de garde-champêtre, le rendant obligatoire dans toutes les communes de France. Elle en établit aussi les critères de recrutement : avoir au moins 25 ans, savoir lire et écrire, avoir une bonne condition physique, faire partie des vétérans nationaux ou des anciens militaires pensionnés.
C'est ainsi que Marcel Combaud, né en 1887, sous-officier, cultivateur, médaillé militaire et mutilé de guerre, est nommé garde-champêtre le 29 septembre 1936, en remplacement de Monsieur Izambert, démissionnaire. Il décède en 1959 à 69 ans.
● Celui qui garde les moissons
Si bon nombre de gardes champêtres assurent aussi la fonction de « tambour, afficheur », cette règle ne s'impose pas systématiquement : Marcel Combaut est nommé par deux arrêtés distincts, le même jour, à ces deux emplois différenciés.Depuis les années 1800, des gardes champêtres ont officié à Réparsac. Le dernier en date, nommé à cette fonction, mais à temps partiel le 20 décembre 2001, est Jean-Louis Lefort, aujourd'hui retraité. Les premières appellations de garde-champêtre sont « Messor, Mességué, Messier... », tous ces noms signifiant « Moisson » celui qui garde les moissons. Alors quoi d'étonnant, si l'effectif des gardes champêtres baisse au rythme de celui du nombre des moissonneurs dans nos campagnes (voir tableau ci-joint).
● Le besoin de communiquer
De tout temps les hommes ont éprouvé le besoin de communiquer entre eux, à distance, quand ils ne pouvaient le faire de vive voix. D'où cette aspiration fondamentale à transmettre des messages et à en recevoir.
A partir de 1844, le télégraphe optique (sémaphore) est progressivement remplacé sur le territoire français par un autre télégraphe, électrique celui-là, associé à l'alphabet Morse pour la transmission des messages.
« En 1880, 8 ans seulement après la mort de l'américain Samuel Morse, le monde communique grâce à 160 000 kilomètres de câbles sous-marins qui traversent les océans » (Encyclopédie Larousse).
Réparsac s'inscrit dans cette histoire des transmissions.
● Un bureau télégraphique dès 1885
« Il serait de toute utilité qu'un bureau de Poste soit créé dans la commune de Réparsac qui a déjà, depuis plus de dix ans, son bureau télégraphique » (délibération du Conseil Municipal du 20 février 1896).
Augustin Pouzou, le maire de l'époque, se voit chargé par son conseil « d'obtenir dans les plus brefs délais, la création d'une poste sur la commune ».
Comment pourrait-il imaginer que Réparsac devrait encore attendre quinze années pour la réception définitive d'un bureau de Poste, en 1911, sous le règne de son successeur Jean Brisson : celui qui sème n'est pas celui qui moissonne.
Pourtant, le premier magistrat de notre village avait bien lu le décret du 16 octobre 1895, signé du Président de la République, et autorisant « la création de recettes auxiliaires des Postes dans un grand nombre de communes rurales qui en feraient la demande ».
Mais c'était sans compter avec l'immense chantier des communes rurales du pays devant s'équiper en bureaux de Postes, télégrammes, téléphones. Pour la seule Charente, près de 380 communes rurales pouvaient y prétendre.
C'est d'ailleurs le sens de la réponse du directeur des Postes et télégraphes à la troisième demande de la mairie, celle du 10 juin 1900 : « Vu l'exiguïté des crédits à ma disposition, il n'est pas possible de créer un bureau de Poste à Réparsac. Cependant, si la commune voulait prendre à sa charge les frais d'un « établissement de facteur-receveur municipal », elle aurait des chances de réussir ».
La réponse de Réparsac ne se fait pas attendre : « Monsieur le Maire propose que la commune ait à sa charge le logement de la receveuse du bureau télégraphique et s'engagerait, entre autre, à abandonner à l'administration des Postes et Télégraphes, le montant intégral du salaire de la receveuse actuelle (déjà payé par la commune) pendant 18 années, soit 250 francs par an. Le conseil prie respectueusement l'administration compétente de faire droit à sa demande. Ce sera justice, la commune ayant toujours soutenu le gouvernement actuel » (conseil du 2 septembre 1900).
Apparemment ce dernier argument ne paie pas, car ce n'est que dix années plus tard que, par l'arrêté du 15 janvier 1910, Monsieur le Ministre des Postes et Télégraphes « autorise la création d'un établissement de facteur-receveur à Réparsac. L'administration des Postes s'engage à payer la location du dit immeuble jusqu'à concurrence de la somme de 200 francs par an ». Elle est de 350 francs dans les années 30.
Un inspecteur constate qu'aucun immeuble existant ne permet de recevoir le bureau des Postes. Il conclu qu'il faut construire un bâtiment neuf au centre du bourg (au n°2 de l'actuelle Grand'Rue).
● Le téléphone en attente
Présidé par Raoul Imbert (maire de 1919 à 1925) le conseil municipal du 30 décembre 1920 estime que le téléphone compléterait utilement le télégraphe. D'où cette délibération : «considérant que la commune fait des dépenses élevées pour avoir son bureau de Poste lui appartenant, qu'elle ne demande pas mieux que d'avoir le téléphone:
- Considérant que Réparsac compte un assez grand nombre de commerçants et d'industriels qui, donneront sûrement un nombre assez élevé de communications; le conseil souscrit entièrement aux conditions énumérées dans la circulaire des Postes ».
Le téléphone est en attente.
● Le télégramme : rapide mais coûteux
Le télégramme, message télégraphié, est utilisé comme moyen de communication rapide pour des informations subites, imprévisibles : décès, maladies, accidents. Ou encore pour joindre les gens à des heures et lieux précis : telles les félicitations à l'occasion d'un mariage. D'où son nom populaire de «dépêche».
Avant la généralisation du téléphone (1975-1980), le processus d'acheminement est le suivant : « l'expéditeur rédige son télégramme et l'apporte au bureau de poste. Le message et l'adresse sont ensuite acheminés par télégraphe jusqu'au bureau de Poste le plus proche, où il est transcrit à la main (ou plus tard à la machine) et acheminé, à bicyclette, chez le destinataire par un employé municipal : le porteur de dépêche »(Wikipédia). Ce dernier reçoit en échange une rémunération, 220 francs par an, à Réparsac, en 1937.
Le télégramme est donc coûteux, facturé au mot par les services postaux. Alors on comprend mieux pourquoi les expéditeurs font l’effort de supprimer les mots non essentiels : c'est le style télégraphique.
Certes, ce moyen est le plus rapide de son époque, pour transmettre un message à distance. Mais son prix élevé le limite aux seuls événements exceptionnels.
Le porteur de télégramme est nommé par arrêté municipal ; agréé par le directeur des postes et télégraphes de la Charente, et se conforme aux instructions de monsieur le receveur des Postes.
La liste est longue de ces femmes et de ces hommes nommés à cette fonction. Citons à titre d'exemples :
- Le sieur Beaumard René nommé le 12 juin 1892, en remplacement du sieur Guillon François, décédé.
- Le sieur Gabriel Etourneaud le remplace en juin 1895.
- Plus près de nous, Laurency Broussin est désignée en 1934 et remplacée par Madame Andrée Dupeux en 1935.
- Henriette Arnaudet assure cette charge en 1937, puis Madame Lucienne Combeaud en 1938...
Ces échanges fréquents résultent d'une exigence de disponibilité parce que le télégramme est toujours commandé par l'urgence.
● Enfin, en 1947...
Une indication nous est donnée sur l'arrivée du téléphone à Réparsac : le conseil municipal du 23 février 1947 « approuve, à l'unanimité, la proposition de Monsieur le Maire pour l'installation d'un appareil téléphonique à la mairie, pour un coût estimé à 2 850 francs ».
Il faut attendre la fin des années 1970 pour observer la généralisation des centraux téléphoniques et, par conséquence, celle du téléphone à la disposition du grand public.
Pour montrer, avec raison, sa bonne couverture du territoire avec ses 17 000 bureaux de Postes dans les années 1995-1999, une brochure (« La Poste » - septembre 1999) nous dit : « que l'on trouve un bureau de Poste dans 45 % des communes rurales et des boulangeries dans seulement 41 % ».
Aujourd'hui Réparsac rassemble la nouvelle Poste et le dépôt de pain en un même lieu convivial, au 1 rue Grand'Ouche. La boulangerie n'est plus, les services de la Poste demeurent.
Durant près d'un siècle (1885-1970-80) le succès du télégramme n'a jamais été démenti, mais « il a été malmené successivement par le télex, la généralisation du téléphone et du courrier électronique » (Wikipédia).
Quelle évolution depuis le processus complexe d'acheminement du télégramme « exceptionnel » à la généralisation populaire du portable permettant d'émettre et de recevoir à volonté !
Les aînés d'aujourd'hui ont vécu cette fulgurante révolution technologique, c'est dire la difficulté à prévoir celle de demain.
REPERES - 1829 : Apparaît le signe PTT (Poste Télégraphes Téléphones) - 1849 : Premier timbre poste français à l'effigie de la déesse des moissons, Cérès - 1879 : Fusion de la Poste (Ministère des finances) et du télégraphe (Ministère de l'intérieur) - 1881 : Création de la Caisse Nationale d'Epargne gérée par la Poste (3 500 000 déposants en 1900) - 1885 : Bureau télégraphique à Réparsac - 1911 : Première Poste à Réparsac - 1918 : Création des chèques postaux - 1929 : Loi obligeant la distribution du courrier à domicile - 23 Février 1947 : Installation d'un appareil téléphonique à la Mairie de Réparsac - 1980 : PTT signifie Poste Télécommunication Télédiffusion - 1991 : Les PTT se réforment en deux entreprises publiques « La Poste » et « France Télécom » |