L'Eglise Notre Dame de Mareuil
L’église romane de Mareuil dépendait au Moyen Âge et jusqu’à la Révolution de l’archiprêtré de Jarnac et du diocèse de Saintes. Dédiée à l’origine à saint Saturnin, dont le culte était répandu chez les Wisigoth (Ve et Ve siècles) elle a été placée après 1280, sous la protection de Notre-Dame, nom d’un prieuré situé sur le même lieu[1].
L’édifice dont la construction remonte à la seconde moitié du XIIe siècle, comme l’attestent la nef et la façade qui sont de style roman assez tardif, a été reconstruit en partie au XVe siècle. De cette époque datent le faux-carré et le chevet plat. L’église a bénéficié d’une importante restauration en 1899-1900 par les architectes Barbaud et Bauhain[2].
L’église possède aujourd’hui un plan très simple comme la plupart des églises du Rouillacais : la nef de trois travées est voûtée en berceau sur doubleaux retombant sur des colonnes dont les chapiteaux sont décorés de boules aux angles. Le faux-carré et le chevet plat achevant l’édifice à l’est sont tous deux voûtés d’ogives retombant directement en pénétration dans les colonnes qui les portent, sans chapiteaux intermédiaires. Une chapelle s’ouvre au nord du faux-carré prolongée à l’est par la sacristie. L’ensemble des voûtes a été reconstruit en brique à la fin du XIXe siècle.
La façade, datant de la seconde moitié du XIIe siècle, est épaulée de deux contreforts massifs dont la construction doit remonter au XVe siècle. Au rez-de-chaussée le portail en plein cintre est encadré de quatre voussures retombant sur des colonnes à chapiteaux ornés pour certains de feuillages. À l’étage, une baie en tiers-point éclaire la nef. La façade s’achève par un mur pignon.
De puissants contreforts, probablement construits à la fin du Moyen Âge, renforcent la nef. Le haut clocher rectangulaire recouvert d’une toiture d’ardoises élancée à quatre pans est situé à l’extrémité orientale de l’édifice, dans la prolongement du sanctuaire ce qui constitue un emplacement très inhabituel en Charente. Ce beffroi est l’œuvre des architectes Barbaud et Bauhain à la fin du XIXe siècle et semble avoir été construit ex nihilo ce qui pourrait expliquer son implantation inaccoutumée. Aucune source ne donne d’indication sur l’emplacement du clocher primitif. Ce dernier portait une cloche refondue en 1751 bénite alors par le curé de la paroisse.
Il semble que les restaurations de la fin du XIXe siècle aient été largement motivées : en 1843 déjà la mairie avait déposé des demandes de travaux restées sans suite en préfecture pour effectuer des réparations aux toitures.
En 1898, les deux architectes, influencés par le courant architectural néo-médiéval, concentrèrent toute leur attention à la reconstruction des parties hautes de l’édifice en prenant certaines libertés avec l’histoire du monument. Ils ajoutèrent au sommet de la nef et dans le clocher des éléments défensifs (crénelages, archères et chemin de ronde) évoquant une église fortifiée convaincus que «l’église était autrefois la chapelle d’un château-fort..... la façade ouvrait à l'intérieur de la forteresse... le mur latéral sud était situé à l’intérieur du château….»[3].
Or, nos recherches n’ont relevé la présence d’aucun château-fort dans le bourg et encore moins en périphérie de l’église. Barbaud et Bauhain font-il référence au logis noble dont l’existence dans la paroisse est avéré mais dont l’emplacement exact reste inconnu ? Ils auraient dans ce cas confondu ce logis avec un hypothétique château-fort. Cette confusion témoignant de leur volonté d’inscrire l’édifice dans un imaginaire néo-médiéval très en vogue à la fin du XIXe siècle.
[1] NANGLARD (J.), Pouillé historique du diocèse d’Angoulême, t.III, Angoulême, 1900, p. 440
[2] Élèves des Beaux-Arts de Paris, les deux hommes débutent leur collaboration en 1894. Ils possèdent trois agences d’architecture : à Paris, Angoulême et Bordeaux. Les deux architectes maîtrisent les styles Louis XV et Louis XVI en vogue au début du XXe siècle qu’ils mêlent aux influences néo-gothiques, à l’art nouveau et à l’art déco. Leur création la plus prestigieuse est l’immeuble art nouveau du syndicat de l’épicerie, rue du Renard à Paris édifié en 1910. Pour cette réalisation ils font appel au sculpteur Rispal. À Angoulême, Barbaud et Bauhain ont édifié en 1897 la chapelle d’Obezine puis en 1907 l’immeuble art nouveau situé rempart Desaix et le Grand café de la Paix face à l’hôtel de ville.
[3] Rapport de visite des architectes datant de 1897 - Archives départementales