L'Eglise Notre Dame de Mons

L’édifice fut bâtit sur un promontoire dominant la vallée de l’Auge et le bourg qui s’est développé à quelques mètres en contrebas.

Cette église romane est le seul vestige conservé d’un ensemble de bâtiments prioraux implantés au XIe et XIIe siècles.

Historique 

Les plus anciennes sources mentionnant l’existence de l’église de Mons datent de 1110 et précisent son appartenance à la mense épiscopale. Cependant, nous ignorons ses dates de fondation et de consécration.

Elle fut par la suite rattachée au prieuré voisin de Lanville dont elle est décrite comme l’une de ses plus anciennes possessions. L’église actuelle date probablement du 1er quart du XIIe siècle.

La paroisse de Mons fut donc le siège d’un prieuré-cure maintenu jusqu’en 1616. À cette date, « le prieuré-cure fut transformé en simple prieuré »[1] et l’on créa deux paroisses : Mons et Aigre. Le prieur était toujours nommé par les chanoines de Lanville, mais dès lors un curé était également désigné plus spécifiquement pour assurer les messes réservées aux fidèles. C’est le prieur, avec le consentement de l’évêque qui faisait le choix de ce curé.

La guerre de Cent Ans qui fit rage dans la région, au XIVe siècle opposant Anglais et Français puis les guerres de Religion au XVIe siècle ont probablement affecté l’intégrité de l’église.

Au XVIIe siècle (1652), lors de son rattachement à l’ordre de Sainte-Geneviève, le prieuré de Mons fut placé sous l’autorité de l’abbé de Sainte-Geneviève de Paris. Seule l’église est conservée, sans vestige des bâtiments qui l’entouraient.

Au XVIIIe siècle, un incendie accidentel la détruisit en grande partie comme l’atteste les multiples traces de rubéfaction encore visibles à la base des murs. L’église a été reconstruite 11 ans plus tard.

 

Rouverte au culte en 1775, elle fut fermée en décembre 1792, par ordonnance gouvernementale et son curé Pierre-Dominique Salomon fut expulsé de la cure par la première municipalité de la commune.

Des dégradations furent constatées dans l’église en 1804. Elle fut alors réaménagée et rouverte au culte.

Foudroyée en 1806 et en partie détruite, l’église fut reconstruite avec une voûte en plâtre. La souscription auprès des habitants permis dès 1846-1848 de doter l’église d’un clocher moderne et de mobilier : autels secondaires en brique, maître autel en pierre remplaçant le précédant en bois, statue de la vierge. Le chemin de croix fut érigé par le curé de Ruelle en 1861.

Tout au long du XXe siècle, de multiples réparations sont réalisées après l’inscription de l’église en 1941 sur la liste supplémentaire des Monuments Historiques.

En 1987, le clocher est entièrement refait après avoir a été endommagé par la foudre.

En 1988 d’importantes restaurations (intérieur et extérieur) sont menées : charpente, chœur, vitraux, maçonneries.

La voûte de plâtre construite au XIXe siècle est alors détruite et la charpente découverte, mettant au jour tout le haut des murs et révélant les chapiteaux. À l’occasion de la restauration du chevet, des traces de peinture en grisaille ont été découvertes, ainsi que des traces d’ocre rouge sur les chapiteaux de la nef. Lors des réparations effectuées en 2013, les ardoises du clocher ont été replacées et les gouttières refaites, tandis que la toiture en tuiles de l’église était vérifiée.

Les vitraux ont été imaginés par Colline Fabre artiste verrier.

Architecture

L’église est constituée d’une nef unique, scindée en trois travées,  d’un faux-carré et d’un chevet plat.

La charpente apparente couvrant aujourd’hui la nef est venue remplacer une voûte en pierre disparue à une date indéterminée.

L’aspect de la nef diffère d’une travée à l’autre.

A l’ouest, la première travée est animée de deux arcades jumelles reliées par un pilastre plat à chapiteau nu.

Au revers de la façade, on peut observer la trace d’un arc brisé.

La seconde travée devait être voûtée d’une coupole. La présence à l’ouest des colonnes sur dosserets placés en oblique le laisse supposer, tandis qu’à l’est de cette travée, des faisceaux de trois colonnes indiquent un changement de parti pris dans le voûtement à la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle.

Les colonnes possèdent des bases à griffes et des chapiteaux à crochets ou boules végétales. La troisième travée, plus ample que les précédentes fut percée de grandes baies en plein cintre postérieurement. Les vestiges d’une corniche en place sur les murs gouttereaux indiquent que le mode de couvrement primitif devait être une voûte en berceau remplacée par au moins une coupole et à la fin du XIIe siècle, voir au début du XIIIe siècle par une voûte d’ogives. Sylvie Ternet pense que la nef était voûtée, soit il s’agissait d’une croisée d’ogives au profil bombé, évoquant les voûtes « Plantagenêt », probablement à la fin du XIIe siècle ou au début du XIIIe siècle, soit qu’une tentative d’établir une file de coupole ait échoué à la fin du XIIe siècle pour choisir finalement une croisée d’ogives.

Sculpture

Un des chapiteaux de la nef illustre un épisode du jugement dernier : la pesée des âmes. Ce thème iconographique est rarement représenté dans la sculpture romane charentaise. Hormis à Mons, il se retrouve dans l’église d’Étriac en Sud-Charente. L’archange Saint-Michel est chargé de peser les âmes des défunts lors du retour du Christ Juge à la fin des temps. Les justes sont conduits vers le paradis, les damnés vers l’enfer pour y endurer d’effroyables tortures. Cette scène est également figurée dans les peintures murales romanes de l’ancienne chapelle des templiers de Cressac. Très souvent des démons tentent de faire pencher frauduleusement la balance de leur côté. Le chapiteau faisant face à celui de la pesée des âmes présente des animaux fantastiques issus du bestiaire roman tels les griffons, les créatures mi- lion mi- aigle, incarnent souvent l’antéchrist qui oppresse et persécute avec la férocité du lion et fond sur ses victimes avec la vélocité de l’aigle.

Leur pouvoir destructeur est encore amplifié par la croyance médiévale selon laquelle les griffons démembreraient les humains. En attribuant à chaque animal ou créature hybride une personnalité et une « valeur » morale, les bestiaires placent chaque espèce au sein d’une hiérarchie dont l’homme occupe le sommet. La symbolique des bestiaires qui découle principalement de la Bible et des récits antiques, illustre le thème de la lutte du bien contre le mal.

Délimitant la nef et le faux carré, deux piliers massifs supportent un arc en plein cintre. Le faux carré est voûté d’une coupole sur pendentifs.

L’abside a été voûté d’une croisée d’ogives à triple moulure qui repose sur des colonnes engagées à l’est et sur les piliers de la travée sous clocher à l’ouest. Le sanctuaire est éclairé par deux baies romanes au nord et au sud et par une baie gothique du XVe siècle placée dans l’axe.

Selon Sylvie Ternet, l’édifice aurait été fortifié entre le XIIIe et le XVe siècle. Une salle haute aménagée au- dessus du chevet était accessible par une porte aujourd’hui murée, située en haut du mur de refend entre la nef et la travée sous clocher.

Ce tableau de Sainte-Anne apprenant à lire à la Vierge est situé dans le faux-carré. Il s’agit d’un don de Babinet de Montaigon en 1850.

Des dessins gravés dans la pierre, appelés signes lapidaires, sont visibles dans l’église. Il s’agit des signes : plus petit ou égal ; d’un angle aigu à la pointe marquée d’un losange à l’intérieur, d’un T ou  d’une croix. Leur signification demeure inconnue à ce jour. Deux cadrans solaires se voient également au sud de la façade.

Extérieur

La façade repose sur un soubassement peu épais et légèrement saillant. Elle est délimitée par deux pilastres adossés sur des contreforts plus larges qui s’élancent jusqu’à la naissance du mur pignon triangulaire.

Au rez-de-chaussée, le portail est entouré de trois larges voussures en berceau reposant sur des colonnes dont la base en forme de griffes est courante au XIIe siècle.

Cette sobre façade présente une sculpture de qualité notamment sur l’un des chapiteaux du portail figurant Daniel dans la fosse aux lions.

Daniel est l’un des quatre grands prophètes (avec Ezéchiel, Isaïe et Jérémie). Daniel, grâce à son habilité à interpréter les rêves en vient à occuper une position influente à la cour de Babylone. Des hommes, jaloux de la faveur dont il jouit à la cour, l’accusent de crime de lèse-majesté. Il est donc jeté dans la fosse aux lions dont on fait sceller l’entrée. Le lendemain, Daniel est toujours vivant. Il raconte que Dieu lui a envoyé un ange gardien pour museler la gueule des lions. Il sort de la fosse. Plus tard, Daniel est accusé d’avoir empoisonné un serpent sacré. Il est à nouveau jeté dans la fosse. Dieu lui fait porter des vivres. Le roi de Babylone revient le 7ème jour et constatant que Daniel est toujours en vie le libère convaincu de la puissance du dieu des Juifs.

Daniel est généralement représenté jeune et imberbe ce qui le différencie des autres prophètes. Il est le symbole de l’âme sauvée du mal et du Christ ressuscité sortant du sépulcre scellé. La fosse aux lions symbolise l’enfer. Daniel devient un symbole eucharistique.

Selon Sylvie Ternet, le modelé assez fort, les plis polygonaux du long vêtement de Daniel, les incisions des articulations des lions, les plumes des ailes de l’ange et les pupilles délicatement percées au trépan font de cette corbeille une œuvre, datable du milieu du XIIe siècle.

Les autres chapiteaux sont ornés de griffons dans des entrelacs, de lions, d’oiseaux aux griffes acérées. La voussure supérieure du portail est ornée de monstres qui engloutissent leurs pattes.

Dans la partie haute, une baie allongée a été percée. Deux petites colonnes la cantonnent et deux voussures la coiffent. Les corbeilles des chapiteaux des colonnettes sont décorées de feuillages et d’un oiseau qui semble piquer le front d’un personnage. Les tailloirs des chapiteaux se prolongent de part et d’autre de la baie formant une ligne d’imposte ornée de dents de scie.

Au XVe siècle, la construction de puissants contreforts est venue renforcer les murs de la nef et du faux-carré au nord comme au sud.

Reposant sur le ressaut de l’un d’entre eux, côté nord, deux sculptures intriguent. Deux personnages allongés et dénudés, l’un féminin à la poitrine bombée, l’autre masculin barbu et exhibant son sexe, sont difficiles à interpréter. S’agirait-il d’une représentation de la luxure ou bien la figuration d’Adam et d’Eve ? L’interprétation est rendue difficile par l’altération des motifs.

Les massifs contreforts du chevet plat ont été installés très certainement au XVe siècle.

Le clocher de forme carrée est moderne. Il se termine par une flèche en charpente à quatre pans assez élevés. Il abrite une cloche datant de 1775 portant des inscriptions indiquant qu’elle fut fondue par Gamsbero, fondeur. Pierre Babinet, écuyer, seigneur de Rancogne en était le parrain et Marie-Anne de Massougnes des Fontaines, la marraine.

 

[1] NANGLARD (J), Pouillé historique du Diocèse d’Angoulême, tome II, Angoulême, 1897