L'église Saint Pierre et son clocher tors
L'église, dédiée à Saint-Pierre, devait être normalement romane à son origine mais de cette époque, elle a seulement conservé une tour du XIème siècle avec 4 fenêtres en plein cintre, dont deux très petites, caractéristiques des premières églises romanes. Cette église se fait remarquer par son clocher « tors » construit en 1629. Il fait partie de la cinquantaine de clochers ayant droit à cette appellation en Europe Occidentale.
« Espèce de tordu »
Pardon, dites « torsadé » ou « flammé », ce serait plus convenable ou encore tout simplement « tors » ou « vrillé » car c'est vrai, depuis ma naissance, on m'a voulu « tors ». Vous me connaissez certainement car je suis, pour votre service, le clocher de l'église de Meslay -du-Maine. D'aucuns voudraient que je sois tordu au fil des ans à cause de la mauvaise qualité du bois. Pas du tout. Vous me connaissez mal. Celui qui m'a conçu a voulu que je sois tors d'un huitième de tour. C'est précis ! Il a fallu bien calculer pour que je ne sois pas complètement tordu et que mes lignes de ma couverture aient la bonne courbure.
Celui qui m'a voulu ainsi c'est Jean Martinet, architecte de Laval, en 1629. On dit qu'on m'a confié aux compagnons du devoir pour sortir de l'ordinaire. Quelques notables mélinois voulaient donner à la tour de l'église autre chose qu'un classique toit en bâtière comme à Bannes ou maintenant à Saint Denis du Maine. C'est d'ailleurs de Saint Denis du Maine que ma construction a été suivie avec intérêt, sinon envie, et consignée dans les archives paroissiales. C'est là que j'apprends que j'aurais commencé mon existence le 28 novembre 1629. Mais dès le 6 mars 1630 un violent orage de vent brise en deux ma charpente. Le 12 septembre nouvel orage. Finalement ce n'est que le 19 septembre 1631 que la plomberie est faite et que mon aiguille est couverte d'ardoises.
J'étais bien dégagé, à ce moment là, du reste de l'église qui était plus bas que maintenant. Ce n'est qu'en 1839 que la couverture du transept est venue s'appuyer contre moi. Je penche un peu d'un côté mais ma naissance a donc été mouvementée. On a même rechigné à payer l'architecte Martinet, peut être parce que je n'étais pas comme tout le monde et surtout parce que ma naissance n'était pas le fruit d'une décision du conseil de fabrique. Depuis, j'ai connu bien des orages et j'y ai perdu bien des ardoises. Je supporte une croix de 3m de haut fleurdelisée et depuis 1992 je suis clocher « tors » ou « vrillé » de la Mayenne. J'ai 4 frères dans le Baugeois. Nous sommes 6 en Pays de la Loire et 33 en France. Actuellement 107 clochers tors ont été recensés en Europe. C'est devenu un sujet de conversations et de réunions à l'échelle de l'Europe.
Une réunion européenne fort sérieuse s'est tenue d'ailleurs le 5 juin 1994 à Vieil Bauge en Maine et Loire où M. Le Maire ainsi que M. et Mme LESAINT m'ont représenté. Soyez-en sûrs il faut montrer ses lettres de noblesse pour avoir droit au titre de « clocher tors ou vrillé ». Dites-le autour de vous : je ne suis pas n'importe qui !
Et en passant, jetez un coup d'œil et vous verrez que je suis bien « tors » mais juste ce qu'il faut pour être honorable et digne de figurer au patrimoine européen.